Gestion du risque en entreprise et leadership

Gestion du risque en entreprise : Le risque est partout et impose de la lucidité.

Le risque est au cœur de la vie et de l’avenir. Ce qui est passé n’est plus risqué, une fois décédée une personne ne risque plus de mourir. Le figé est sans risque, l’organique, le génératif est risqué. La création est un risque énorme : le risque d’échouer, de ne pas convenir, d’être plagié, de plagier sans s’en rendre compte, de choquer, de déplaire, d’être rejeté, incompris, ruiné (Bernard Palissy et son émail, les artistes maudits, etc.). Il s’agit donc d’apprendre à faire avec le risque, au risque sinon certain de s’épuiser, ou de s’arrêter net : “A trop museler sa monture, on risque de se retrouver enfourchant un cheval de bois.” Dris Chraibi. 

Cet article développe les ingrédients nécessaires à une analyse de risque, ce que représente la conscience du risque, et enfin les stratégies de "coping" permettant de faire avec le risque.

Gestion du risque en entreprise : leadership et analyse de risque

Deux paramètres ressortent d’une analyse de risque : la façon dont on le mesure ou le perçoit, et la façon dont on vit avec, dont on le gère.

1. La mesure du risque implique de vérifier sur quoi il porte, et d’identifier sa probabilité d'occurrence

Risque = intensité d’un mal x sa probabilité d'occurrence (aléa)

Il s’agit donc pour identifier un risque d’analyser s’il porte par exemple sur une vie humaine ou une sur une casse matérielle, et de lui attribuer une valeur relative. Certains risques sont plus difficiles à dimensionner que d’autres. Au sujet des risques liés au développement de l’IA générative, le risque de perte de liberté, bien qu’identifié, est complexe à mesurer. Des décisions ont néanmoins été prises pour le prévenir, et le choix réalisé dans le cas de l’IA Act [1] a été de classifier les différentes formes d’IA en IA interdites (risque inacceptable), IA à haut risque, et les autres, qui échappent en grande partie à la réglementation.

De manière générale, on a tendance à surestimer les risques de petite et de moyenne intensité mais à forte fréquence (ce sont ceux que l’on voit) par rapport aux risques à forte intensité mais à faible fréquence. Ainsi au niveau domestique le risque de feu reste sous-estimé, et le risque météo (fera-t-il beau pour mes vacances ?) peut nous sembler plus important que le risque climatique. 

La perception de la valeur du risque est très teintée par notre histoire personnelle. On le voit par exemple en capital risque, où le risque de liquidation d’une entreprise est une règle vu de l’investisseur (le taux d’échec des start-ups est compris entre 60% à 90% [2]), et une catastrophe vu de l’entrepreneur. La perception de la valeur du risque en occurrence et en intensité sera également liée à la durée de la vie humaine, à la mémoire collective, et à la capacité de rebond. 

2. La gestion du risque intègre toutes les décisions que l’on prend à titre personnel ou matériel pour “faire avec”

Le risque est une décision permanente, dans laquelle entrent les questions d’éthique, de valeurs, de coûts, et de contexte. La connaissance du risque n’est pas suffisante pour le régler, il y a la façon dont on le perçoit intimement, ce qui nous pousse à agir, et les ressources à notre disposition. 

Gérer le risque est une question fondamentale de lucidité. Cela impose accepter que le risque existe, et de mettre en place un mouvement de changement, une stratégie adaptative qui évoluera avec la situation. La question sera alors d’installer les protections à sa disposition, et d’anticiper ce que l’on fera si le risque se produit pour y être préparé.

Comme le dit un ami marin naviguant dans les zones rocheuses de Bretagne, “qui va lentement tape doucement”. Dans ce cas précis, ralentir est la stratégie choisie. Elle ne supprimera pas les récifs, mais permettra à la fois de mieux observer les roches affleurantes et de faciliter l’évitement, et si on devait les cogner, de minimiser la casse. 

Gestion du risque en entreprise : la conscience du risque est un enjeu en soi

Nous voyons souvent en coaching des personnes qui ont peur de changer un comportement car cela comporte un risque. A titre d’exemple “ briller comporte le risque d’être jalousé par les autres “. Mais la personne concernée dans ce cas 1. ne mesure pas le risque de ne pas le faire (rester dans l’ombre, ne pas être vue, être écrasée ou oubliée…) 2. ne perçoit pas que son appréhension du risque impacte son comportement de manière inconsciente et se mue en certitude de problème, c'est-à-dire une probabilité d'occurrence proche de 100%.

Le coaching facilite la mise en perspective et l’approfondissement qui permet de tirer les fils d’une situation bloquée. Plusieurs approches seront utiles pour sortir de cette inertie, diminuer le risque, et permettre de meilleures décisions :

Questionner ses croyances : pourquoi j’appréhende ce risque ? sur quoi je me base? comment je sais que ce risque existe? 

Revenir au contexte : Souvent les bénéficiaires des coachings généralisent le risque. Or si l’on reprend l’exemple précédent, il est possible que dans certaines situations il y ait un risque à briller (être jalousé/e par les autres) et que dans d’autres ce ne soit pas du tout le cas. Le fait de caractériser le risque dans un contexte précis diminue globalement l’idée que la personne se fait du risque, et permet d’identifier les contextes dans lesquels la peur liée au risque est salutaire. 

Les questions associées du coach peuvent être : 

“Dans quels contextes ce risque existe et dans quels contextes il n’existe pas ?

“Quel risque y a t–il à bouger ?”

“Quel risque y a-t-il à ne pas bouger ?”

“Quel est le risque le plus important ? Bouger ou ne pas bouger ?”

Identifier l’existence d’un risque : Dans d’autres situations, le bénéficiaire peut foncer tête baissée sans prendre conscience des risques potentiels. Là, le travail du coach peut consister à vérifier s’il y a un risque dont le bénéficiaire n’aurait pas conscience.

Les questions associées pourront être : 

“Que risquez-vous à réussir ?” “À atteindre votre objectif ?” 

Ces questions seront assez complémentaires de “Quels bénéfices avez-vous à échouer ?”

Gestion du risque en entreprise : développer sa lucidité repose sur des stratégies de “coping” 

Le schéma en référence dessine une chronologie de l’appréhension du risque et de la façon dont il peut être géré d’un point de vue personnel. Lazarus et Folkman [3] définissent le “coping” comme “l’ensemble des efforts cognitifs et comportementaux toujours changeants que déploie l’individu pour répondre à des demandes internes et/ou externes spécifiques, évaluées comme très fortes et dépassant ses ressources adaptatives”. Plus simplement, les stratégies de coping sont une réponse psychologique au stress. 

Gestion du en risque entreprise
Approche transactionnelle du stress de Lazarus et Folkman (1984)

Dans le cas de la gestion du risque, elles permettront de développer des pensées ou des comportements adaptés pour faire face à la tension générée par l’incertitude et la peur de l'occurrence possible d’une épreuve pouvant engendrer un préjudice.

Le problème, les émotions, et le support social

Les chercheurs [4] distinguent trois catégories de coping :

  • les stratégies d’adaptation centrées sur le problème. Dans le cas de la gestion du risque, cela impliquera la diminution du mal induit par le risque, et/ou la réduction de son occurrence. Dans le cas classique d’un risque de feu, cela sera par exemple souscrire une assurance, et mettre aux normes son installation électrique. 
  • les stratégies d’adaptation basées sur les émotions. On pourra notamment citer le fait de réévaluer la situation comme un challenge ou une opportunité plutôt qu’un risque ou une menace. On passera ainsi d’un risque subi à un risque choisi, dans une dynamique personnelle permettant le dépassement du risque. Dans d’autres cas, si la situation n’est pas contrôlable, et que les éléments ne relèvent pas de son pouvoir, il s’agira de lâcher prise. Prendre du recul, relativiser, développer une vision positive et réaliste des évènements aidera à accepter ce qui ne peut pas être changé.
  • les stratégies d’adaptation axées sur le support social. Obtenir l’aide d’autrui en développant des relations interpersonnelles positives permettra de disposer du soutien nécessaire pour affronter le risque ou l’accepter, et réduire la perception de ses effets délétères. 

Appréhender le risque de façon clairvoyante permettra de maintenir notre énergie créative, d’éviter l’épuisement de nos ressources, et de développer notre capacité de rebond. La stratégie d’adaptation déployée au niveau du problème est souvent privilégiée dans nos sociétés cartésiennes. Il est grand temps d’y intégrer des stratégies développées au niveau personnel et interpersonnel ! Améliorer les stratégies de bien-être, diminuer les stratégies d’évitement, passer de la résignation - déresponsabilisation à la modification choisie de la situation, et passer de l’acharnement au lâcher-prise dans les dimensions non contrôlables, seront autant d’ingrédients à introduire dans notre plan d’action pour accompagner un progrès durable.

Le coaching génératif, avec son approche globale, permet de mettre en perspective les enjeux du système et ses enjeux personnels, et d'accompagner le déploiement de ces trois stratégies de façon coordonnée. 

Le collectif Mainpaces

[1] IA Act : https://artificialintelligenceact.eu/fr/

[2] Taux d’échec des start-ups est compris entre 60% à 90% : https://tool-advisor.fr/blog/chiffres-startup-francaise/

[3] Lazarus et Folkman : https://www.cairn.info/risques-psychosociaux-et-qualite-de-vie-au-travail--9782100781447-page-119.htm

[4] 3 catégories de coping : https://y2cp.com/pdf/publications/lucie-cote/ameliorer-ses-strategies-de-coping-pour-affronter-le-stress-au-travail.pdf

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