Prospective - L'Espace : science, avenir de la terre et business

Extrait de la Newsletter Leading #3 du 20 Mai 2022 - Plongée dans un "What If ?" prospectif

Le 12 mai 2022, les membres de la collaboration Event Horizon Telescope (EHT) ont réussi un exploit historique prometteur pour mieux comprendre la physique de la gravitation et le monde des galaxies. Il s'agit de l'obtention avec des radiotélescopes de la première image de ce qui semble bien être un trou noir supermassif au cœur de la Voie lactée, Sagittarius A* (SgrA*).

Avec eux ce mois-ci, nous partons explorer l’Espace. Un vaste sujet qui nous amène à prendre de la hauteur, à élargir nos horizons, à s’ouvrir, à croire en nos rêves les plus fous, et qui paradoxalement nous ramène aussi à la Terre et à nos origines.

Depuis toujours source d’émerveillement, nous sommes passés du mythe à la possibilité au milieu du XXème siècle, et l'espace nous est devenu accessible. Il est rapidement devenu une zone d’influence, un terrain où se jouent la souveraineté des États et les conflits idéologiques, où chacun cherche à prouver au monde la supériorité de son modèle et de ses moyens techno-économiques. Et en même temps, la complexité et la richesse scientifique du sujet nous obligent à créer des coopérations internationales exceptionnelles qui se maintiennent au-delà des tensions, comme le montre l’ISS (Station spatiale internationale) qui continue à fonctionner en dépit de la guerre en Ukraine.

Le secteur spatial entre aujourd’hui dans un nouveau paradigme avec le New Space. Avec l’émergence de nouveaux acteurs privés tels que Space X, Blue Origin, Axiom Space, une marchandisation de l'espace s’accélère et des enjeux complexes en matière de réglementation et d’éthique apparaissent.

• Et si la privatisation du secteur permettait d’accélérer la recherche scientifique en diminuant drastiquement les coûts ? Et si l'internet par satellite favorisait l'émancipation des peuples opprimés ? Starlink a joué un rôle important en Ukraine et prévoit de couvrir la majeure partie de la planète d’ici 2 ans. 

• Et si l’espace était déjà un ensemble d’infrastructures pour les activités de la vie courante ? Et si l'observation par satellite nous donnait des moyens de lutter efficacement contre le réchauffement climatique ? Et d'éviter une guerre nucléaire en surveillant le développement d’armes et l’envoi de missiles ? Le projet européen Copernicus offre un accès libre aux données et encourage le développement de startups à impact.

• Et si l’on pouvait demain, prendre une semaine de vacances all-inclusive dans l’espace ? Des villes en orbite qui deviendraient des “hubs” commerciaux et touristiques ? Orbital Assembly y travaille et nous annonce : “Space is open for business.”

• Et si la Terre était vraiment condamnée ? Et si la colonisation de Mars représentait un vrai espoir pour l’humanité et le vivant ? Et si les partisans du transhumanisme cherchaient juste un endroit où vivre tranquillement une fois qu’ils auraient obtenu l’immortalité, pendant qu’ils regardent de loin une planète qu’ils auraient contribué à détruire ? Et si le rêve de la terraformation était juste une imposture pour s’emparer du marché aujourd'hui ? 

• Et si demain, des entreprises étaient capables d’exploiter des ressources dans l’espace, comme l'hélium 3 lunaire, et les ramener sur Terre pour subvenir à nos besoins ? Et si la protection de l’espace et la réserve de son utilisation pour le bien commun de l’humanité et des sciences représentait un enjeu assez important pour regrouper la communauté politique internationale ? Quelle gouvernance mettre en place ? Aura-t-on besoin d’une police de l’espace comme nous avons déjà des premiers satellites-éboueurs  de débris spatiaux ?

• Et si l’on arrêtait d’envoyer des humains dans l’espace ? Et si l’on arrêtait de parler de l’espace comme d’un nouveau territoire à “conquérir”, et qu’on s’en tenait à l’exploration à des fins scientifiques ?

La recherche autour des trous noirs, comme Sagittarius A*, pourraient apporter des clés pour comprendre la naissance de l'univers et de la matière. L’homme a toujours essayé de se comprendre en regardant les étoiles, il y retrouve un ordre naturel auquel il est intimement lié. Quelle vision souhaitons-nous avoir de l’univers et de notre place dans celui-ci ? Peut-on continuer à nourrir notre curiosité, notre désir de liberté, notre propension à explorer, tout en respectant l’espace qui nous a été donné ?

Stefan de Lavergne

COO, Mainpaces