Leadership et innovation : diriger est-ce oser la folie face à celle du monde ?
Le monde semble dérailler : Dérèglement climatique, dérives géopolitiques, guerres, crise sanitaire, absence de visibilité économique, anxiété sociale chronique, emballement de l’IA … L’actualité donne le vertige et la sensation qu’on entre dans une ère d’incertitude radicale, quasi inédite. À force de voir l’impensable devenir quotidien, c’est une certaine folie du monde qui s’installe.
👉 Dans un monde devenu fou, faut-il soi-même être un peu "fou" pour agir ?
Nous vous proposons d'explorer ce sujet dans cet article à travers les 4 parties suivantes :
Si la folie, c’est sortir de la norme, alors peut-être est-ce exactement ce qu’on attend d’un dirigeant aujourd’hui. Sortir des sentiers battus. Penser de biais. Imaginer l’impossible. Bref, faire ce que d’autres n’osent plus.
Comme le dit cette phrase attribuée à Einstein :
" La folie, c’est de faire toujours la même chose et d’espérer un résultat différent. "
Albert Einstein
Leadership et innovation : dans un monde aux repères bouleversés, il faut du courage pour créer du neuf – non pas malgré la folie ambiante, mais en la traversant. C’est le modèle du héros, « un bon diseur de mythes et un bon faiseur d’exploits » (Iliade, IX, 440). Dans leur récit les mythes accompagnent les transformations et les révolutions de la vie afin qu’ils deviennent porteurs de sens.
Le dirigeant qui ose assumer sa singularité pour allier leadership et innovation, quitte à être jugé "hors normes", "trop intuitif", "pas assez rationnel", s'inscrit dans une lignée de penseurs visionnaires : des architectes qui font des “folies” dans le paysage, aux artistes comme les surréalistes, qui ont réenchanté le réel à coups de rêves éveillés.
Gustave Le Bon, dès 1895, nous alertait sur la dynamique irrationnelle des foules : un groupe est saisi par la peur ou l’émotion peut devenir aveugle. C’est exactement ce que les réseaux sociaux amplifient : des masses réagissant à chaud, dans des bulles d’opinion. Alors il faut parfois être "fou" – ou du moins inconformiste – pour ne pas se laisser emporter par cette marée.
Mais cette folie n’est pas du chaos, c’est de la clairvoyance. Une capacité à voir large, à 360°, à se relier à plus grand que soi, à sentir le "kairos", le moment opportun pour inventer, oser, décaler. Ce mouvement exige une attitude nouvelle.
Le psychanalyste Jung, après sa rupture avec Freud, plongea dans une crise profonde. Il en sortit avec son étonnant Livre rouge. Pour traverser l’inconnu, il s’appuya sur trois verbes puissants :
🫧 Laisser advenir. Considérer (mettre à distance). Se confronter.
C’est une invitation pour les dirigeants à cultiver cette forme d’intelligence intuitive, ancrée et transformatrice. Intelligence qui a affaire avec la résilience, la (re)construction du sujet, à condition que celui-ci acquiesce à un certain décentrement, seul garant de véritable nouveauté.
❌ Il ne s’agit pas d’idéaliser la dépression, la schizophrénie, ou la mégalomaniecomme des moteurs géniaux. Le romantisme, incarné par Goethe dans Les souffrances du jeune Werther, illustre cette vision du génie mélancolique. Or lI n’y a pas de superposition entre folie et créativité1. Les psychiatres le rappellent : si certains patients manifestent des éclairs créatifs, la maladie entrave bien plus qu’elle ne libère.
Ce n’est pas la souffrance qui nourrit la créativité, mais peut-être une certaine perméabilité au monde, une sensibilité extrême, quand elle reste contenue. “ La grande propriété qui nous caractérise en tant qu’être humains, c’est que nous sommes conscients. Penser, cela signifie manipuler des représentations du réel : quand vous pensez à un objet, vous manipulez l’idée que vous vous faites de cet objet et non l’objet lui-même. Cela nous confère un pouvoir incroyable “
La créativité utile, celle qui permet de "refaire le monde", a besoin d’un cadre. L’omnipotence réalise pleinement le sens de la folie dans la mesure où elle rejoint l’étymologie du terme follis, « outre gonflée, ballon ». C’est la folie du pouvoir qui isole. L’obsession de la toute-puissance2. Une folie politique qui crée autant qu’elle détruit. Au centre même du système, elle s’enferme, se séquestre, s’interne jusqu’à véritablement s’autodétruire.
Face à la folie destructrice de la création désordonnée ou de la vanité, la création fertile s’impose dans la mesure :
Elle s’ancre dans des valeurs, comme l’Ahimsa (la non-violence) du yoga et les règles éthiques, qu’ont portées à travers les siècles les religions ;
Elle s’enrichit du regard des autres, de l’auto-critique, de l’écoute. Le "fou du roi" avait le droit de dire l’indicible… c’était son rôle balisé et protégé.
Un dirigeant peut donc assumer une posture créative, décalée, mais il doit aussi être capable de se relier, de se confronter, de poser ses limites.
La vraie folie serait de confondre provocation et lucidité. Ou de se brûler à vouloir sauver le monde seul. Dans ce tumulte, le coaching n’est pas un luxe, c'est un ingrédient nécessaire à l'exercice du pouvoir et de la responsabilité. Il devient un outil de force intérieure, une démarche d’alignement.
Quand la folie du monde percute la sphère personnelle, il ne s’agit pas de “soigner” – ce serait la place du psychiatre – mais de révéler l’être, reconnecter l’individu à son essentiel. C’est l’approche de Mainpaces dont le coaching systémique intègre la personne dans son environnement global.
Un bon accompagnement propose alors plusieurs étapes :
🌏 Quand un dirigeant se transforme, il inspire aussi son organisation et son écosystème. Il devient un point d’appui, une ancre dans la tourmente. Soyons donc folles et fous de penser que nos lucidités contribuent ensemble à recréer du sens et du commun.
Article rédigé par le collectif Mainpaces, mars 2025
extrait de la newsletter Mainpaces - Leading #35 💥 Génie ou folie ?